Depuis Antithesis, on sait que Secrets Of The Moon n'est pas juste un groupe de Black Metal parmi tant d'autres, ce que confirma Privilegivm grâce auquel les Allemands ont propulsé leur art vers une autre dimension, plus glaciale encore. Plus mature surtout. Si Them Bones/This Inner Soil puis The Ambiance Of A Dead Star et enfin Warhead, trois EP remplis d'inédits et de reprises (Venom, Alice In Chains) ne nous ont pas enthousiasmé plus que cela, ils n'ont pas pour autant freiné l'envie de s'abîmer dans les sombres arcanes de ce cinquième opus, sans doute un des albums de Black Metal les plus attendus de l'année.
Le fait que Tom G. Warrior, dont on ne vous fera pas l'affront de présenter les deux principaux projets, Celtic Frost tout d'abord et depuis 2006, Triptykon, s'est vu embauché comme producteur de la bête, n'est sans doute pas étranger à cette attente. La collaboration entre ce qui reste une des entités les plus brillantes de l'art noir et un artiste visionnaire ne pouvait déboucher que sur quelque chose grand. Or, Seven Bells est-il à la hauteur de cette promesse ?
Inutile de tergiverser, le résultat ne comble pas tout à fait nos espoirs, comme si Secrets Of The Moon avait atteint, avec Privilegivm un sommet, le bout de son inspiration. Seven Bells démarre pourtant très très fort avec le titre éponyme dont le son du glas pose immédiatement le décor, noir et funeste. Longue introduction, son tranchant comme une lame, riffs froids incisant la chair, négativité suintant de ses parois, tout y est dit, résumé en sept minutes.
Avec "Goarhead", charnier sinistre et rampant, la température descent encore d'un cran tandis que "Serpent Messiah", tout en tissant un lien avec le titre d'ouverture, martèle une apreté dans l'intensité qui glace le sang et recouvre d'un suaire ténébreux tout ce qui l'entoure. La première partie de l'album s'achève sur "Blood Into Wine", tendu comme un noeud coulant avec ses lignes de guitares vérolées par une noirceur abyssale et ses lourds aplats. Ces quatre titres forment un ensemble compact que cimente une atmopshère d'une dureté glaciale qui doit autant au groupe qu'à Tom G. Warrior.
Enchaînant trois bunkers en un peu plus de trente minutes, la seconde partie s'annoncait sous les meilleures auspices. On se souvient encore de "Harvest", véritable épicentre de Privilegivm, qui témoignait chez ses auteurs de la maîtrise du long cavenas mortifère. Si "Nyx", qui gronde d'un souffle lugubre, s'impose comme une remarquable création irriguée par des riffs grésillants et venimeux, "Worship", malgré la présence de Schwadorf (Empyrium) en invité et surtout "The Three Beggars", durant lequel jaillit un chant féminin fantomatique et pourvu d'un final obsédant, ne sont pas les mortifications espérées car n'évitant pas toujours les longueurs, quand bien même elles trônent par leur puissance souterraine, largement au-dessus de tous les imitateurs qui n'ont pas manqué d'apparaître suite au succès des Allemands. Reste que ce long tunnel, s'il confère à Seven Bells des allures de bloc malsain en même temps qu'une construction cyclique (cf. le glas sur lequel meurt la dernière piste), l'exonère d'une part de son intensité laquelle retombe quelque peu à partir de "Worship".
Oeuvre plus noire encore que ne l'était Privilegivm, Seven Bells n'est donc pas le chef-d'oeuvre attendu car les limites de ce Black Metal très personnel commencent à affleurer à la surface. Secrets Of The Moon n'en demeure pas moins un groupe d'exception...