Mael Mórdha a toujours occupé une place à part au sein d'une confrérie Doom où les valeurs et le respect du credo demeurent essentiels. L'origine de cette singularité tient autant à son origine géographique, l'Irlande, qu'à sa muse gaélique. De là découle une approche du genre extrêmement personnelle, sorte de croisement entre Candlemass pour les riffs pachydermiques et les envolées épiques, et Cruachan pour l'apparat celtique (mais le chant féminin en moins), si tant est que cette définition soit satisfaisante. Si sur le papier, l'alliance peut paraître incongrue, le résultat pourtant sait convaincre.
Le groupe sort de la terre irlandaise (à Dublin pour être précis) en 1998. Plusieurs EP forgent son identité où les touches folkloriques se conjuguent à une musique granitique et sombre, puissante et massive. L'année 2005 le voit à la fois graver un split culte avec son compatriote Primordial et sculpter Cluain Tarbh, sa première offrande publiée sous l'égide de l'éphémère label Karmageddon Media.
Elle tire son nom d'une zone au nord de Dublin où s'est tenue la bataille de Clontarf en 1014, qui vit le roi Brian Boru repousser l'invasion Viking. Son socle est constitué de plusieurs titres issus, soit de The Path To Insanity ("Realms Of Insanity") ou Coaineadh Na nGael ("Pauper Of Souls") cependant que d'autres inédits, tels que "The Serpent And The Black Lake", datent de 1997. Souvent déjà anciennes, on sent que ces compositions ont été rodées depuis longtemps.
Elles ont quelque chose de falaises contre lesquelles viennent se fracasser des guitares minérales et le chant majestueux de Roibeard O'Bogail, druide en chef de cette troupe qui ne rigole pas vraiment malgré le visuel médiéval et 'monty pythonesque' de Cluain Tarbh. Bien que présents, piano et flûte affleurent plus qu'ils ne forment la colonne vertébrale de ce que les Irlandais ont justement baptisé "Gaelic Doom". Jamais guilleret ni festif, Mael Mórdha écrase tout sur son passage, tel un Kraken venu du fond des mers. Il n'est d'ailleurs jamais aussi bon que lorsqu'il libère une écume tellurique, comme l'illustrent l'imposant "Wings Of One Thousand Winters" ou le titre éponyme enténébré par un chant rugueux presque Black Metal.
A cause d'une seconde partie en retrait et de maladresses qui ne sont pas encore évitées (pour l'usage des instruments traditionnels par exemple), ce galop d'essai n'arrive toutefois pas à la cheville de son successeur, Gealtacht Mael Mórdha, où les Irlandais atteindront la pleine maturité de leur style, au point d'accoucher alors de leur meilleur album à ce jour.