Sidony Box est un jeune groupe français constitué de trois musiciens issus d'une formation musicale jazz mais qui ont recyclé ce qu'ils ont appris pour délivrer un album tout aussi rock que jazz. Jouant une musique totalement instrumentale, le trio est atypiquement constitué d'un guitariste (Manuel Adnot), d'un saxophoniste (Elie Dalibert) et d'un batteur (Arthur Narcy), promesse de voyages sonores dépaysants. Et la promesse est tenue !
Tantôt le groupe délivre un jazz-rock bouillonnant et agressif où se côtoient un sax échevelé, une batterie chaotique et une guitare saturée ('Rules', 'Dark Wizard'). On pense alors aux titres expérimentaux de King Crimson ou Magma (ce n'est probablement pas un hasard si l'album est produit par Stella Vander). Rien n'est confortable, l'auditeur sombre dans un univers hostile, trépidant, psychotique mais toujours cohérent et chargé d'émotions.
Tantôt le groupe s'adonne aux lancinances du post rock, voire à l'évanescence de l'atmosphérique ('Nocturnum', 'Gotham', 'Ambre'). Le sax égrène des notes fragiles et délicates, belles à pleurer, la guitare bâtit des murs d'arpèges et la batterie rentre ses griffes et montre qu'elle est aussi à l'aise dans la légèreté que dans la frappe lourde. La douceur de 'Nocturnum' confine à la berceuse, l'ambiance sombre de 'Gotham' conviendrait certainement à Batman et la virtuosité fait place à la sensibilité sur le magnifique 'Ambre' qui clôt l'album. Notes étirées, minimalisme, latences, lenteurs, silences entrainent l'auditeur dans un spleen sans fond.
Entre ces deux univers, un remplissage plus ou moins réussi. 'Salsa' est un titre sensuel, sinueux comme un serpent, teinté d'exotisme mais il faut aimer le son pour le son, savourer la prestation des musiciens plus que rechercher un fil conducteur bien difficile à trouver. 'Girafe' monte lentement en puissance, sax et batterie brodant leurs variations autour du placide ostinato de la guitare. Un titre qui malgré sa longueur garde l'auditeur en haleine. C'est finalement le fredonnable 'Electric Love' et le presque dansant 'Block Party' qui s'en sortent le moins bien, sans vraie saveur, rappelant les expériences "The Long Hello" des transfuges de Van der Graaf Generator autour du saxophoniste Daniel Jackson.
Bien évidemment, cet album ne plaira pas à tout le monde avec des titres sortant des sentiers battus et folâtrant selon l'humeur des interprètes bien loin des structures stéréotypées des tubes FM. Il faudra apprécier les improvisations et les musiques qui semblent ne mener à rien pour espérer trouver du plaisir à l'écoute de ce disque. Sidony Box a emprunté une voie "casse-gueule" où il est facile de se fourvoyer dans un onanisme musical pseudo-cérébral qui cache souvent mal l'absence de profondeur et d'inspiration. Evitant cet écueil avec intelligence, le groupe trouve un juste équilibre entre avant-gardisme et mélodie, délivrant un album sensible et souvent attachant.