Dimmu Borgir a vu le jour à Oslo, en Norvège, sous l'impulsion de Shagrath, Silenoz et Tjodlav qui se partagent guitares, chant et batterie. Avec l'aide de deux amis, ils ne perdent pas de temps et proposent un premier Ep, "Inn I Evighetens Morke" dès le début 1994. Leur tout premier album, "For All Tid", ne tarde pas et arrive sur un label local en Décembre de la même année. Les Norvégiens sont encore bien loin du son léché qu'ils auront peu de temps après. Ils proposent un black-métal atmosphérique et symphonique chanté en Norvégien et assez différent du black-métal de l'époque. Le ton du disque est bien moins sombre que celui de ses confrères du genre: le côté atmosphérique donné par des claviers omniprésents donne à la musique de Dimmu Borgir un aspect très aérien et rêveur, loin de la haine habituelle.
Cela étant: "For All Tid" est loin d'être parfait. Il contient certes tous les aspects qui font le charme d'un premier album, entre fraicheur, naïveté et ambition artistique, mais il a de gros défauts. Pour commencer, le son du disque est assez médiocre, les guitares manquent un peu de puissance et le tout sonne très rugueux. De plus, vocalement, tout n'est pas encore parfait: Silenoz n'est pas toujours au point avec ses parties de chant black avec un ton très grave parfois un peu rebutant. Cela étant, les qualités de composition sont déjà bien là. Il se dégage une atmosphère et une aura particulière, à la fois accessible et envoutante, les claviers y sont pour beaucoup, mais également sombre et malsaine, comme dans une vieille nouvelle de Lovecraft où on se laisse entrainer par une fausse impression de confort.
De cet ensemble de 9 titres, se dégagent des morceaux qui montrent un fort potentiel et qui, avec un son meilleur et une expérience plus grande, seraient sans aucun doute des hymnes de black atmosphériques. Ainsi, "Glittertind", "Den Gjemte Sannhets Hersker" et "Raabjorn Speiler Draugheimens Skoode" sont de belles réussites sur lesquelles ces atmosphères se dégagent avec une force et une puissance glaciales. Dans la suite du disque, il y a logiquement du bon et du moins bon. "Det Nye Riket" est une belle et longue introduction au piano avec juste une voix parlée pour faire entrer dans l'ambiance du disque. Ensuite, malgré un chant criard faiblard, proche du Dani Filth des débuts, "Under Korpens Vinger" se distingue grâce à de belles ambiances aux claviers et un riff de guitare que l'on distingue bien, très black dans l'âme. Par contre, "Over Bleknede Blaner Til Dommedag" manque de finition et est plombé par un chant clair fort peu maitrisé. Enfin, "For All Tidd" et "Hunnerkongens Sorgvarte Ferd Over Steppe" souffrent trop de ces problèmes de son pour se distinguer complètement, et on sent que Dimmu Borgir est encore un peu tendre pour ce genre de titres de black atmosphérique.
"For All Tid" reste un album mineur de la carrière d'un Dimmu Borgir qui fera bien mieux par la suite. Cela étant, il possède ce petit aspect de fraicheur qui fait son charme et s'avère assez accessible pour s'initier à ce genre de black-métal. Les musiciens sont très jeunes et sont encore remplis d'une certaine utopie artistique. De fait, ce disque laisse un bon souvenir et marque les débuts du groupe norvégien avec une certaine classe. Il est à noter enfin que le disque a été ressorti en 1997 avec en bonus les deux titres du 1er Ep du groupe, "Inn I Evightens Morke", coupé en deux parties et qui confirme que, dès le début, Dimmu Borgir avait un net penchant pour la facette atmosphérique de son art black métal.