"More Thrill & Never Ending Blessing" est le premier album du groupe belge The Green Violinist constitué autour de Vincent Dufresne qui, outre les parties de chant, de claviers et de guitare acoustique qu'il assume, est également l'auteur de la quasi-totalité des compositions.
Ne cherchez pas de violoniste de quelque couleur que ce soit au sein du combo, il n'y en a pas. Le nom est emprunté à une toile de Marc Chagall qui servit d'étincelle à l'inspiration de Vincent Dufresne à une époque où celui-ci cherchait à se sortir de la dépression qui le minait. Dans l'œuvre de Chagall, le violoniste est un personnage qui accompagne symboliquement la destinée humaine... Quel meilleur compagnon de route pour un musicien en perdition ?
Toujours est-il que les mânes du peintre ont dû approuver ce choix, "More Thrill & Never Ending Blessing" étant un album gorgé d'une inspiration sombre et romantique au parcours parfois tortueux. Ainsi, après un premier rock haut de gamme, dense, touffu, sur lequel s'incrustent cris d'angoisse, cloches funèbres et nappes d'orgue aux sonorités de cornemuses, The Green Violinist prend son auditoire à contrepied en enchaînant deux titres pop rock FM. Si 'Velvet Road' évolue dans un crescendo poignant, 'Shy People' est une chanson gentillette que ne renieraient pas James Blunt, Daniel Powter ou Cock Robin. Il est vrai que le timbre de Vincent Dufresne ressemble beaucoup à la voix chaude de Peter Kingsbery et que la participation sur certains titres d'Emilie Laclais ajoute encore à cette ressemblance.
Fort heureusement, l'album change à nouveau d'orientation avec le long 'Do Worry Be Sad'. Constitué de trois parties distinctes, un rock mélodique raffiné, un instrumental hypnotique et un final digne d'un péplum hollywoodien, le morceau gagne progressivement en intensité, la voix de Vincent Dufresne se déchirant sur de véritables accents de désespoir, l'auditeur se voyant littéralement transpercé par la tristesse de son chant empathique. 'Human Connection' renoue avec le dépouillement acoustique relatif de 'Velvet Road' et installe une atmosphère brumeuse, impalpable et mélancolique. Quelques volutes de piano croisent une guitare magique, une batterie intelligente accompagne une basse profonde et des orgues pénétrantes. Un titre splendide suivi du magnifique 'Any Words You Say', ronde triste et romantique nous entrainant au son de ses cordes synthétiques. Pour finir, 'Bad Inheritance' est peut-être le titre le plus complexe de l'album, tantôt dépouillé, tantôt orchestral, jamais linéaire. On est loin des accents pop de 'Shy People'.
Les nombreux changements stylistiques de l'album en constituent à la fois sa force et sa faiblesse. Gages d'une créativité s'exprimant par une belle diversité, ils frôlent parfois le manque d'homogénéité, un peu comme si le groupe avait hésité sur le chemin à suivre. Saluons enfin la qualité de l'enregistrement qui met en valeur la finesse du jeu des musiciens, tous impeccables. Les instruments se croisent, se répondent, se rejoignent puis se séparent au gré d'une partition fourmillant de détails. Cette clarté sonore rend justice à l'excellent travail de The Green Violinist qui conjugue tout au long de cet album sensibilité et intelligence, raffinement et harmonie.