Tokamak, c’est une affaire de famille. L’histoire d’un père (Marcel Gallimard, bassiste), qui a su transmettre la passion de la musique à ses deux fils (Marc, batteur, et Rémi, claviériste intégré plus tardivement au groupe). Avec Thierry Vidal à la guitare et Jorge Dias au chant, les Marignanais sortent un premier EP en 2010, puis ce “Solitude” en décembre 2012.

La pochette, austère et inquiétante, annonce la couleur : l’album est proclamé “noir, triste, mélancolique”, le concept étant de décrire la solitude sous toutes ses formes, à travers des personnages en détresse. Grand amateur de Pain Of Salvation, Porcupine Tree ... ou de Camel, le groupe profite de cet éclectisme pour construire des ambiances sombres, parfois à la limite du désespoir (“Qui sait s’il est toujours bien sage d’espérer ?”), avec des textes soigneusement écrits (voir le rap de ‘Tes Pas’, poignant).

Il est surprenant de penser que les claviers ont été introduits relativement récemment dans l’histoire de Tokamak. Par leurs sombres colorations, ils ajoutent un plus indéniable à l’atmosphère oppressante de l’opus. ‘Seul mais en vie’, exécuté sans cet apport, est le titre le plus abrupt de l’album, parcouru de riffs un peu envahissants. Mais dès que les synthés entrent dans la ronde, les atmosphères s’enrichissent sans fioritures excessives, le groupe arrivant même à installer des climats tendus sur des titres comme l’excellent ‘Agonie’ ou le court ‘La Fourmilière’, très réussi avec sa finition minimaliste bien adaptée. Des riffs tranchés et lourds parcourent certains titres (‘La Cible’, ‘Elle’, deux belles réalisations).

Tout n’est bien sûr pas parfait, il s’agit ici d’un premier vrai album. Le chant de Jorge Dias, quoiqu’ habité, manque un peu de présence, surtout dans les graves - il est vrai que les textes en français rendent la partition vocale plus difficile à exécuter. La section rythmique peut elle aussi progresser : elle est efficace, mais manque encore de signature. Les grands soli qui font la gloire du progressif pur jus feront également défaut aux amateurs d’envolées instrumentales (notons quand même les velléités caméliennes du solo de guitare de ‘Qui Sait ?’), et les arrangements manquent parfois d’habillement (notamment sur la ballade ‘Dans ma Tête’).

Malgré celà, Tokamak a plutôt bien réussi son entrée. ce premier album possède un ton qui ne demande qu’à s’épanouir. Gageons que l’avenir nous réserve de belles surprises du côté de Marignane !