Nous avions quitté Crowned In Earth en 2010, alors quasi one-man band, celui de Kevin Lawry, auteur du séminal Visions Of The Haunted dont le contenu comme le contenant l'arrimaient au pur Doom Metal british façon Cathedral. Le passage du label Shadow Kingdom, un de nos fournisseurs préférés en matière de galettes plombées et sabbathiennes, à Black Widow trahit bien le changement qui s'est opéré en l'espace de deux ans dans ce projet. Le visuel d'inspiration "Roger deanienne" qui habille A Vortex Of Earthly Chimes, termine de nous convaincre qu'il ne s'agit (presque) plus du même auteur.
Ceci dit, ceux - la majorité (on ne vous en voudra pas trop) - qui le découvriront, attiré par cette pochette aux allures d'invite progressive, s'ils n'en seront pas totalement pour leur frais, risquent d'être déçus par cette seconde offrande qui certes trempe moins dans le chaudron du Doom mais ne fait pas non plus franchir au britannique le Rubicon visant à faire de lui un vrai groupe de Rock progressif. Reste que Crowned In Earth démontre que les deux genres ne sont pas nécessairement si éloignés l'un de l'autre que cela. Une propension à tricoter de longues pistes, le recours à des claviers hantés ainsi que l'humus seventies les rapprochent.
Du coup, de prime abord étonnant, eu égard à la teneur sentencieuse de Visions Of The Haunted, le Doom symphonique que forge A Vortex Of Earthly Chimes, fonctionne au bout du compte parfaitement. Si "Ride The Storm" qui l'amorce, repose durant ses premières mesures sur un socle pachydermique que soulignent des nappes synthétiques qui l'arriment à la vague horrifique et occulte biberonnée aux films de série Z, très vite, le ton change se faisant plus feutré. Même constat avec le second le morceau de bravoure de l'opus, "Watch The Waves" au rythme très lent et irrigué par la guitare parfois figée dans le marbre. Mais il y a cette brume de Mellotron au fort pouvoir d'évocation et cette construction qui n'a rien à voir avec du Doom.
Plus que dans les titres courts, forcément plus Heavy, à l'image de "World Spins Out Of Key" que zèbre un solo de six-cordes ravageur, auquel succède toutefois la parole d'un orgue Hammond, ce sont les longs développements s'étirant sur plus de 11 minutes en moyenne, qui offrent à Kevin Lawry le cadre idéal à cette expression progressive. Celle-ci trouve une de ses plus belles illustration avec "Given Time", parfait mix entre substrat plombé et arabesques symphoniques, que tissent autant des claviers vintage que cette guitare qui sait se faire aérienne à la manière du Steve Howe de Yes.
Assez méconnaissable, Crowned In Earth n'en signe pas moins un bon disque qui ne trahit finalement pas les racines de son principal auteur, toujours ancrées dans le terreau des années 70. Le mariage entre Doom et progressif n'est pas nouveau, que l'on se souvienne de Sabbath Bloody Sabbath, mais rarement un groupe aura oser s'aventurer sur ce terrain d'une flamboyance symphonique. Le résultat est là pourtant, automnal et coloré.