Trois ans, il aura fallu attendre trois interminables années pour connaître la réponse à l’insoutenable question qui nous tenaille depuis la sortie du monumental "The Waste Land". Trois ans que nous nous demandions si Hord allait confirmer tous les énormes espoirs placés en lui et en faire un nouveau fer de lance du metal Hexagonal… En bref, "The Book of Eliot" va-t-il récompenser cette longue attente fébrile ?
Plus que jamais inspiré de l’œuvre de TS Eliot, "The Book of Eliot" est plus qu’un simple album, c’est une œuvre complète aux visuels et à la thématique fouillés chers aux esprits torturés de Jonathan Devaux et Hadrien Tourrenc… Après une entame "Analepsis" posant les bases du flash-back émotionnel de cet opus, "Confession" et surtout la bombe "At the Gate" nous ramènent directement aux imparables fondamentaux Hordien déclinés sur "The Waste Land" à la différence notable que l’intronisation d’Hadrien Tourrenc aux growls gutturaux apporte une diversité vocale déjà extrêmement riche.
Cependant, si "The Waste Land" se caractérisait comme un album homogène à l’efficacité redoutable, "The Book of Eliot" risque de décevoir dans un premier temps. D’une teneur moins immédiate que le mélodeath moderne aux relents mathcore polyrythmique de "The Waste Land", "The Book of Eliot" s’avère une œuvre plus atmosphérique, progressive… bref, plus diversifiée et riche à l’instar des chapitres du voyage chaotique des mémoires testamentaires de celui qui a changé la face de notre Monde déchu.
En effet après l’interlude ambiant "The Sleepless Journey", les différentes étapes saisonnières de la vie d’Eliot se déclinent à la faveur d’atmosphères antinomiques comme la rage de "The Unwaverings" sur lequel pour l’occasion, Hord ajoute une corde metalcore thrashy à son arc, la mélancolie sur l’instrumental atmosphérique crescendo "On Collision Course", l’intransigeance du melodeath déclinée à la vitesse du messager Hermod sur "Unleash the Hermod" ou encore une combinaison de tous ces sentiments extrêmes comme sur les monumentaux "Landscape with the Fall of Icarus" et "Kindermord" aux intonations Hacride… Une multitude d’émotions pour autant de variations musicales qui jalonnent ce testament, clôt magistralement par l’instrumental ambiant envoûtant "What the Thunder Said". A cet égard, la production maison et le mixage confiés à Magnus Lindberg (Cult of Luna) entretiennent cette impression de tergiversations introspectives à l’opposé des travaux ultra-modernes de Jochem Jacobs (ex-Textures) sur "The Waste Land".
S'il était quasi-impossible de surpasser "The Waste Land", les montpelliérains ont su diversifier leur recette pour éviter toute comparaison qui aurait découlé sur une inéluctable déception. Dans un registre moins immédiat mais plus diversifié lui permettant par la même occasion de se détacher de son affiliation Textures, Hord frappe à nouveau un grand coup avec cet album servi dans un sublime écrin toujours signé Jakob Arevarn et vient grossir le contingent des quelques groupes metal français phares !