Une question pour commencer : Amorphis peut-il accoucher d'un mauvais disque ? Depuis 1992 et son premier effort, The Karelian Isthmus, cela n'est jamais arrivé. Quelques (très) relatives déceptions, à l'image de The Beginning Of Times, opus consommé mais sans surprise, parsèment évidemment une discographie où l'actif l'emporte toutefois sur un passif dérisoire.
Fidèle à une formule éprouvée dont ils ne se départiront sans doute plus, les Finlandais ne déçoivent donc jamais vraiment, quand bien même il est permis de leur reprocher cette écriture quasi automatique source d'intarissable d'hymnes immédiats mais désormais ronronnante. Si durant ses vertes années, le groupe n'a eu de cesse d'évoluer, allant même jusqu'à braconner sur les terres floydiennes le temps du magnifique Far From The Sun, ce n'est plus le cas depuis l'arrivée du néanmoins excellent chanteur Tomi Joutsen en 2005, avec lequel le groupe a cependant gravé une de ses meilleures galettes, Skyforger. Circle s'en rapproche-t-il ?
Deux ans après The Beginning Of Times, la recette n'a bien entendu pas bougé d'un iota proposant une collection de chansons toujours accrocheuses, calibrées à leur manière et toutes pourvues d'une mélodie mémorisable ou bien d'une ligne vocale envoûtante. Selon sa bonne habitude, Joutsen alterne chant vaguement caverneux et couplets en clair ("Nightbird's Song", que colorent des teintes légèrement folkloriques), cependant que "Shades Of Gray", amorce puissante à la trame entêtante, permet d'entrée de jeu à ses auteurs de se mettre le fan dans leur poche.
Ceci dit, Circle possède bien davantage de charme que son prédécesseur... Et surtout de réussite. Cette valeur ajoutée, il la doit moins à une forme toujours impeccable depuis la prise de son à l'exécution, qu'à une inspiration qui se dresse tout du long sans jamais faiblir. Il convient ainsi de mentionner "Hopeless Day" qui voit Tomi livrer une performance puissamment émotionnelle dans ce titre distillant une ambiance sombre et désespérée que soulignent de lourds aplats et "Into The Abyss", titre emporté par un rythme rapide dont le guide sont ces guitares qui tissent une toile qui colle à la mémoire.
"The Wanderer" à l'entame qui rappelle les atmosphères progressives de Far From The Sun ou "Narrowpath", qui mérite mieux que son introduction un peu facile car trop typique du style Amorphis, achèvent de faire de Circle un bon cru. La qualité de ses morceaux marque la différence avec The Beginning Of Times, album de plus dans la carrière du groupe, ce que ce douzième opus n'est justement pas sans pour autant se hisser sur le trône occupé par Skyforger...