Depuis que Geoff Tate, l'ex-vocaliste de Queensryche, a quitté l'an passé son groupe d'origine et qu'il a décidé de former un autre combo, nous nous retrouvons avec deux Queensryche, puisque le Monsieur a décidé d'en reprendre l'appellation "pas très contrôlée" par ses ex-partenaires qui continuent quant à eux leur chemin avec le même nom. Visiblement les sondés ombrageux ont le vent en poupe, lapidant sur la toile, à la fois l’ego du susnommé et dans la foulée l'album qu'il vient de sortir, un Frequency Unknown qui fait donc débat.
Tate a une haute opinion de sa petite personne, voilà qui est acquis depuis bien longtemps, mais il semble également de surcroît rancunier au vu de la pochette de l'opus, un visuel genre "poing dans votre face" dirigé, à n'en pas douter, vers ses anciens voisins de scène et doté d'une bague "F.U." évoquant certes Frequency Unknown, mais déguisant avec évidence un très élégant "Fuck You". Voilà qui va de paire avec le choix du titre de son album solo sorti l'an passé – King And Thieves (le roi et les voleurs). Toutefois, sachons mettre de côté ses éléments collatéraux et concentrons-nous sur le produit musical en toute impartialité.
A l'écoute de cet album, deux évidences sautent aux oreilles. Premièrement la production ressemble à celle du premier disque de Sylvie Vartan ce qui a d'ailleurs entraîné le réenregistrement de l'album quasiment dans la foulée de sa sortie. En second, la voix de Tate n'est plus ce qu'elle était. Sur ce dernier point la question est de savoir s'il a décidé de ne pas faire d'efforts car il estime qu'il a un talent démesuré ou si ses cordes vocales sont fatiguées. Quoiqu'il en soit le vocaliste gâche le travail de composition honorable du combo et le niveau satisfaisant des autres musiciens.
Sur les quatorze titres de cet opus, quatre sont des reprises du grand Queensryche. "I Don't Believe In Love", "Empire", "Jet City Woman" et "Silent Lucidity", vous ont certainement fait vibrer, mais las, ces nouvelles versions ne font que prouver que Tate a sacrément perdu de sa superbe. Les dix titres restant nous la jouent mi figue-mi raisin. On funambule ainsi dans un Hard Rock parfois forcé vers le Heavy, sur la gamme du plaisant à l'horripilant. Au rayon des réussites, notons un excellent "Everything" très mélodieux et doté d'excellents soli, un progressif "The Weight Of The World" sensible puis pachydermique, un "In The Hands Of God" affichant un tempo entraînant et un "Cold" qui dispose, comme "Life Without You" et "Fallen", d’une mélodie agréable et d’un jeu de guitares aiguisé. Du côté des ratages, citons un "Dare" aux sonorités anarchiques, un "Give It To You", sorte de ballade semi-acoustique sans émotion, un "Slave" bourrin au possible et un "Running Backward" d’inspiration médiocre.
Moins catastrophique qu’on veut bien nous le faire croire, mais très loin cependant d’être l’album de l’année, ce Queensryche, puisqu’il faut bien l’appeler ainsi, ne nous réconcilie pas complètement avec Tate dont l’album solo précité était une pure ineptie musicale. Il ne nous reste donc plus qu’à attendre des nouvelles de l’autre Queensryche - qui compte tout de même dans ses rangs trois membres du groupe des origines - en espérant, grâce au respectable vécu commun de ses protagonistes, qu’il nous permettra de constituer un opus complet et satisfaisant de Queensryche.