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"L’orientation "comédie musicale" de ce "Transitus" a imprimé une direction vers laquelle il est difficile de suivre Arjen Lucassen (Ayreon)."
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2/5
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Pour le meilleur ou pour le pire, les comédies musicales sont à la mode, et le prog’ suit le mouvement depuis déjà quelques années, soit sous la forme d’opéra-rocks (Dream Theater et son "The Astonishing"), soit plus proche du "musical" (Clive Nolan et ses projets Caamora et Alchemy). Et voilà qu’à son tour Arjen Lucassen se lance dans l’aventure. Le géniteur d’Ayreon a déjà produit avec talent des story-albums, souvent sur des thèmes de SF (l’épopée de la planète Y, entre autres), des concept-albums (l’excellent "The Theory of Everything"), et il cherche à présent à proposer un produit qui le démarquera de ses concurrents. Voici donc "Transitus", comédie musicale sur double CD, accompagné d’un livret de 48 pages illustrant son synopsis original sous forme d’une bande dessinée (‘comic’ en V.O.).
Côté présentation, l’objet impressionne : outre son artwork soigné et original, la troupe de chanteurs recrutée est, conformément à la tradition ayreonnienne, tout à fait bluffante, même si elle fait appel à quelques habitués (Tommy Karevik notamment, qui rempile pour la troisième fois consécutive avec ici le rôle de héros). Parmi les nouveaux arrivants, on note la présence de Paul Manzi (Arena).
L’histoire quant à elle ne se situe pas dans la droite ligne des récits précédents, mais l’habitué des productions d’Ayreon reconnaîtra quelques points communs (la référence au thème récurrent "The Human Équation" par exemple). L’action quitte les territoires de la SF d’anticipation pour se déplacer à la fin du XIXè siècle et nous narrer une énième variation sur un amour impossible : un thème très traditionnel et pas vraiment sous-tendu par des arrière-plans complexes.
Cette simplicité de propos étonne chez Ayreon. Et pourtant elle est assez traditionnelle dans l’univers de la comédie musicale. C’est la même logique qui va faire changer l’appréhension musicale du projet, et hélas le faire déraper. Explication pédagogique.
Premier point : pour qui n’a pas le livret en mains, il sera difficile de comprendre le récit : ni les récitatifs ni les lyrics ne mentionnent que si les amours dont il est question sont inavouables et clandestines, c’est parce qu’il est blanc et riche et qu’elle est noire et pauvre, un élément indispensable à la compréhension. Le récit entremêle par ailleurs deux univers, le monde réel de 1883 et un monde imaginaire (Transitus), sorte de purgatoire d’où le héros entre vie et mort essaye de réhabiliter sa dulcinée, accusée d’avoir causé son décès alors qu’en fait c’était un accident. Ajoutez un frère félon, un père trop autoritaire, des anges qui font l’aller-retour entre les deux mondes et une statue parlante qui sert de confident au héros, et vous avez une trame bien confuse pour servir de scénario.
Deuxième point : pour éclaircir ce scénario à la fois simpliste et embrouillé, Arjen Lucassen fait appel à des récitatifs explicatifs à chaque entame de morceau. Lui qui avait si brillamment réussi à éviter cet écueil dans "The Theory of Everything" où il y avait de la musique et rien que de la musique, nous assomme avec des parlottes qui perturbent l’écoute et deviennent rapidement pesantes (sur les titres courts, les récitatifs occupent jusqu’à un quart de la durée du morceau). Ce côté explicatif se ressent jusque dans la structure de certains titres, qui font entendre une découpe scénaristique trop voyante (‘Daniel’s Funeral’, qui rejoint la liste des morceaux qui sont plus faits pour être vus qu’écoutés).
Troisième point : Arjen est connu pour l’excellence de sa direction de chant. Difficile d’oublier la qualité de la prestation de Lana Lane dans "The Dream Sequencer", ou plus récemment Tommy Karevik, impressionnant de puissance et de sensibilité dans "The Theory of Everything". Dans "Transitus", la consigne a visiblement été de pousser l’interprétation vers plus d’expressivité, ce qui n’est pas illogique pour un musical mais fait basculer le ton du projet dans une emphase pas vraiment bienvenue. La palme revient à Paul Manzi, qui en fait des tonnes (‘Talk of The Town’, ‘Henry’s Plot’), mais les autres ne sont pas en reste, forçant le trait avec toute une gamme de tics vocaux très inattendus dans l’univers Ayreon : accroche en entame de phrases, dérapages dans les aiguës sur les fins, etc. Par ailleurs la musique apparaît contrainte aux nécessités du récit, sombrant parfois dans la convention (la ballade sucrée ‘Seven Days, Seven Nights’, la fade bluette ‘Daniel’s Vision’), posant une emphase pesante sur le morceau d’ouverture et la conclusion, bien loin des équilibres dynamiques auxquels Arjen nous avait habitués. De la même manière les orchestrations suivent le même chemin (‘Inferno’, ‘Lavinia’s Confession’), jusqu’à la batterie qui se fait plus pesante ( Juan Van Emmerloot a remplacé le fidèle Ed Warby).
Heureusement tout n’est pas mauvais : Arjen possède un savoir-faire qui livre des harmonies vocales superbes (‘Hopelessly Slipping Away’), des riffs bien efficaces (‘This Human Equation’), des mélodies prenantes (‘Two Worlds Now One’, hommage au Floyd de ‘Shine On You Crazy Diamond’). Et puis ses interprètes ont malgré tout un sacré talent : Joe Satriani (dément !) et Marty Friedman nous font chacun un solo de guitare magnifique, et Tommy Karevik montre une hallucinante maîtrise des vibes (‘Daniel’s Vision’).
En fin de compte, c’est quand même une impression de dérapage qui subsiste à l’issue de l’écoute de "Transitus". L’option "comédie musicale" a imprimé une direction vers laquelle il est difficile de suivre Arjen Lucassen. Peut mieux faire, de toute évidence...
Plus d'information sur
http://www.ayreon.com
LISTE DES PISTES:
01. Fatum Horrificum 02. Daniel's Descent into Transitus 03. Listen to My Story 04. Two Worlds Now One 05. Talk of the Town 06. Old Friend 07. Dumb Piece of Rock 08. Get Out! Now! 09. Seven Days, Seven Nights 10. Condemned Without A Trial 11. Daniel's Funeral 12. Hopelessly Slipping Away 13. This Human Equation 14. Henry's Plot 15. Message from Beyond 16. Daniel's Vision 17. She is Innocent 18. Lavinia's Confession 19. Inferno 20. Your Story Is Over! 21. Abby In Transitus 22. The Great Beyond
FORMATION:
Arjen Lucassen: Chant / Guitares / Basse / Claviers / Dulcimer, Glockenspiel Thomas Cochrane: Trompette, Trombonne Alex Thyssen: Invité / Cor Amanda Somerville: Chant / Invité Ben Mathot: Invité / Violon Cammy Gilbert: Chant / Invité Caroline Westendorp: Chant / Invité Dee Snider: Chant / Invité Dianne Van Giersbergen: Chant / Invité / Soprano Jeroen Goossens: Invité / Flûte Joe Satriani: Guitares / Invité Johanne James: Chant / Invité Joost Van Den Broek: Claviers / Invité / Piano Juan Van Emmerloot: Batterie / Invité Jurriaan Westerveld: Invité / Violoncelle Marcela Bovio: Chant / Invité Marty Friedman: Guitares / Invité Micheal Mills: Chant / Invité Patty Gurdy: Invité / Hurdy Gurdy Paul Manzi: Chant / Invité Simone Simons: Chant / Invité Tom Baker: Invité / Narration Tommy Karevik: Chant / Invité
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(5) COMMENTAIRE(S)
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N'ayant jamais réussi à adhérer aux précédents albums, trop metal à mon goût, ce virage vers l'opéra-rock, même kitsch, avait tout pour me séduire. Que les chants soient parfois "forcés", que la musique soit contrainte de suivre la trame narrative, tout cela fait souvent partie du paquet-cadeau opéra-rock. Et certains titres, très efficaces, remplissent parfaitement le contrat de ce genre de productions. Mais ce qui est pour moi rédhibitoire, c'est la présence de trop nombreux passages narratifs qui, outre le fait que le procédé soit daté, cassent la dynamique de l'album et finissent par gâcher le plaisir pris à l'écoute de certains titres. Dommage !
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Pas un mauvais album en soi mais l'impression de redite très forte conjuguée avec d'importantes longueurs (speech entre titres notamment coupant les éventuelles envolées...) l'importent finalement ! Personnellement, j'attends autre chose de l'ami Arjen qui nous a habitué à largement mieux par le passé.
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Pas non plus convaincu par le casting. On tombe dans une sorte de caricature du métal opéra avec quelques moments malgré tout magiques.
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Pas du tout séduit par le casting vocal, Manzi je n'y arrive décidément pas que ce soit dans Arena (qu'il a quitté) ou ici. Des bons moments de musique tout de même, et pourtant l'impression de rapidement tourner en rond. Bref, de loin l'album le plus décevant d'Ayreon, assez loin des fulgurances passées. Peut-être le bon moment pour passer à autre chose ? La piste Ambeon était tellement séduisante ...
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Un joyeux fourre-tout, parfois ennuyeux, souvent insupportable (L'envie de pouvoir bâillonner certains chanteurs est souvent présente). Même s'il est logique d'évoluer pour un artiste, on est très loin de la qualité des albums comme Dream Sequencer ou Electric Castle.
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LECTEURS:
3.2/5 (5 avis)
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STAFF:
2.6/5 (10 avis)
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